Suite à la sortie attendue d’Assassin’s Creed Mirage, Ubisoft publie un Discovery Book et un livre Making-Of. Le Discovery Book est dans une catégorie de livres que nous commençons à bien connaître, car ils accompagnent chaque titre de la récente trilogie que Valhalla vient de clore. L’autre livre, publié dans le même temps, mais pour une occasion plus extraordinaire (quinze ans de licence, ça se fête !), vient donc accompagner ce Discovery Book. Publiés par Larousse, ces livres sont avant tout destinés aux fans, le livre anniversaire s’adresse d’ailleurs aussi bien aux nouveaux fans qu’à ceux qui sont là depuis l’époque PS3/Xbox 360, car il retrace toute l’histoire de la saga.
Si vous avez déjà commencé à vous renseigner sur la licence, sachez que vous n’aurez pas grand-chose à vous mettre sous la dent. Le making-of aura tout de même peut-être la possibilité d’apporter quelques éléments à votre connaissance globale de la série, car le livre retourne aux origines même du projet Assassin’s Creed. Le Discovery Book quant à lui se verra confier la tâche d’apporter des éléments historiques à Mirage, et il le fait très bien. Larousse ne livre pas ici un ouvrage universitaire avec une volonté d’apporter des éléments nouveaux voire critiques, mais plutôt de « résumer » l’histoire du projet Assassin’s Creed et de revenir sur chacun des jeux de la licence.
Livre Assassin’s Creed Making Of
Avec des artworks inédits (parfois en double page), une maquette impeccable et un cartonnage réussi, le produit a de quoi combler ceux qui aiment les beaux livres. Tout est réuni pour donner une prestance et une allure importante au livre. Le travail d’édition sur l’esthétique du projet correspond à l’envergure de la licence, mais c’est surtout le projet de revenir sur chacun des jeux Assassin’s Creed qui est à saluer, l’objectif est ambitieux.
Le livre retrace la genèse de la licence en nous ouvrant les coulisses d’Ubisoft et des sessions de brainstorming pour trouver le meilleur design pour Altaïr, comment intégrer un gameplay satisfaisant, comme le renouveler, comment faire face aux défis techniques comme l’affichage d’une foule aussi immense, etc. Comme on peut le lire, plusieurs défis ont été relevés par Ubisoft et parfois en des circonstances assez difficiles et toujours avec un calendrier très soutenu, comme on le sait.
Toutefois, on pourra reprocher au livre d’être assez peu frais au final, le problème venant sûrement de la parole qui est toujours donnée à des personnes en place chez Ubisoft (et souvent les mêmes), en général les décideurs et les directeurs de département. Sans vouloir connaître tous les dramas ou les ragots d’Ubisoft Montréal, nous aurions aimé un peu plus de nuances pour être un peu plus raccord avec notre époque. Car n’oublions pas que 2023 est une année exceptionnellement généreuse en sorties de jeux, mais aussi une véritable hécatombe pour les développeurs. On aurait aimé que le projet leur accorde la parole.
À ce sujet, la lecture du livre nous aura même fait dresser quelques cheveux sur la tête. Nous pensons principalement à la mention du DLC d’Assassin’s Creed II : Brotherhood.
« Pendant le développement d’Assassin’s Creed II, l’équipe avait décidé de travailler sur une extension ou un DLC intitulé Brotherhood. Mais ce plan a tourné court. Brotherhood est rapidement devenu un titre à part entière. »
Comment ? Pas un mot de plus ? La coupe du jeu ne serait pas la faute à une deadline se rapprochant un peu trop vite ? Un service marketing un peu trop insistant ayant absolument besoin d’une sortie en novembre pour un cadeau sous le sapin un mois plus tard ? Ces deux éléments seraient donc totalement étrangers à l’amputation d’un jeu, les trois séquences de jeu dans la ville de Rome ? Bon, nous aurions pourtant juré que…
« Rome aurait dû apparaître dans Assassin’s Creed II, confie Philippe Bergeron. Nous avions prévu trois villes, Venise, Florence et Rome, mais nous nous sommes vite rendu compte que cela débordait du cadre. Ce n’était pas faisable. »
Voilà donc le fin mot de l’histoire sur ce dérapage totalement contrôlé qui coupera un jeu en deux et, ô surprise, occasionnera deux ventes au lieu d’une. Comme nous vous l’avions déjà dit, l’autocritique n’est pas vraiment de mise, le livre est avant tout là pour proposer de beaux artworks et des images inédites.
Toujours dans ce livre, on pourra quand même connaître les différentes idées internes qui ont pu germer à Montréal. Aussi, on comprend les déboires techniques des développeurs et on s’enthousiasme des diverses astuces qu’ils arrivent à trouver pour contrecarrer les problèmes auxquels ils font face. On pense notamment aux multiplateformes, les problèmes de chevauchement de générations principalement et le travail colossal que cela entraîne.
Aussi, un passage se révèle très intéressant sur la direction qu’ont prise les Assassin’s Creed depuis quelques années avec la télémétrie. La télémétrie permet aux développeurs de voir ce que vous faites in-game et donc de récolter de la data sur votre façon de jouer. Depuis Assassin’s Creed III, qui a reçu un accueil assez mitigé et qui reste un des épisodes les moins aimés de la série, Ubisoft regarde le temps de jeu de ses joueurs et observe les actions de ceux-ci attentivement.
Avec l’arrivée de Black Flag, (qui n’aurait pas vraiment dû s’appeler Assassin’s Creed, d’ailleurs…), Ubisoft a compris que ce n’est pas le fait de jouer un assassin qui plaît au joueur, Edward ne devient vraiment assassin qu’à la toute fin du jeu, et que l’infiltration n’est pas souvent respectée. Suite à cela, quelle direction prendre ?
En regardant attentivement les statistiques (les heures jouées principalement), Black Flag possède une des plus grandes rétentions de joueurs. Et si l’archétype pouvait être plus fluctuant, et si l’assassin n’était pas forcément la clé de voûte d’un jeu Assassin’s Creed ? C’est cette considération pour la télémétrie qui donnera naissance à la trilogie à la sauce RPG que l’on connaît bien désormais, le joueur choisissant lui-même son archétype via un arbre de talents. Si l’archétype est variable, alors la formule peut être appliquée à peu près partout et à toutes les sauces. Un assassin viking ? Pas de problème.
Le gain est double, car en plus de permettre une pirouette au niveau de la diégèse, la fluctuation de l’archétype permet d’éviter la « licence fatigue », facteur qui semble déterminant pour Ubisoft. Comme il est très difficile de trouver de nouveaux éléments de gameplay, le changement d’archétype est la solution. Cela permet de rafraîchir les prochains titres de la série grâce à des approches de missions différentes et une nouvelle rejouabilité.
Le livre s’attardera aussi, et il s’agit certainement de la partie la plus réussie et la plus transparente, sur la stratégie transmédia d’Ubisoft avec la licence AC : mangas, B.D. franco-belge, films, séries, tout y est ! Une frise chronologique revient sur tous les médias créés sous la licence Assassin’s Creed et c’est le moment de se mettre à jour si ce n’est pas toujours fait.
Livre Discovery Book
On s’attardera moins sur cet ouvrage, puisque ceux étant déjà intéressés par la collection connaissent déjà les tenants et les aboutissants du livre. Toutefois, nous sommes obligés de reconnaître que ce Discovery Book vaut le détour, car il couvre une partie historique que nous connaissions fort mal, beaucoup moins bien que la Grèce et l’Égypte Antique en tout cas, et que sa lecture apporte beaucoup d’éléments de compréhension pour ceux qui voudraient se plonger dans la Bagdad d’Assassin’s Creed Mirage.
Avec des illustrations entièrement réalisées à partir du moteur du jeu, le Discovery Book est dans une démarche ultra-transparente. Avec des informations historiques détaillées, on est quasi sûrs que le livre vous donnera envie de vous replonger dans Bagdad même si vous avez déjà terminé Mirage.
Nous ne sommes pas dupes, Ubisoft tient à souligner son expertise historique avec cette collection, mais si le résultat est là, nous n’allons pas bouder notre plaisir ! Religion, artisanat, tactiques de guerre, il y en aura pour tous les passionnés d’histoire. Cette Histoire avec un grand H englobe la microhistoire du jeu et justifie les partis pris inhérents à la création du jeu : les choix du character-design ou bien encore la psychologie de certains personnages dans le jeu, très intéressants pour ceux qui veulent aller plus loin.
Nouveaux bonbons délivrés par Larousse, le Discovery Book et le livre Making-Of d’Assassin’s Creed contenteront largement les fans. Avec une qualité de finition globale et un travail d’édition certain, c’est tout de même un contenu limité que l’on retrouvera dans le livre making-of. Le Discovery Book est quant à lui fidèle à la collection déjà préexistante, les Discovery Books toujours chez Larousse, et a le mérite d’éclairer une période trop méconnue en Europe Occidentale, celle de la Bagdad mythique que l’on retrouve dans Mirage.
Malgré la réception assez mitigée du dernier Assassin’s Creed et une licence qui commence à devenir légèrement poussive, on ne se fait pas trop de soucis sur les ventes de ces livres Assassin’s Creed. Objets cadeaux par excellence, ces livres trouveront leur public sans accrocs. Sans s’en cacher, ils restent des goodies qui viendront compléter une collection de passionné.