Il y a peu, l’embargo sur Death Stranding a été levé et les médias internationaux ont pu publier les critiques de l’énigmatique jeu d’Hideo Kojima.
Après que Metacritic et/ou Opencritic ont rassemblé la plupart des notes données aux tests, une grande controverse a commencé à surgir à travers les commentaires et les réseaux sociaux : la disparité entre les différentes appréciations. Certains médias, parmi lesquels quelques Français, ont placé Death Stranding au niveau d’une œuvre exceptionnelle, quand d’autres, au contraire, considèrent le nouveau jeu de Kojima comme un titre qui ne serait que de la « poudre aux yeux ». Alors, pourquoi tant de différences ?
« Un chef d’oeuvre, tout simplement… »(Panthaa, JVC)
Tout d’abord, Death Stranding est un jeu si spécial qu’il ne laissera personne indifférent, ce qui signifie que vous risquez fortement de soit l’aimer, soit le détester. Ce n’est pas un jeu de plus parmi tant d’autres, ce n’est pas non plus un concept existant réalisé sous une autre forme. Le jeu est bien une oeuvre atypique. Tentons maintenant d’en expliquer les raisons.
Kojima a développé un jeu narratif qui prend ses marques lentement et qui peut paraître fastidieux au début. Death Stranding vous propose un concept qui cherche avant tout à éveiller des sensations chez le joueur, des émotions, de toute intensité, qui sauront vous attraper si vous vous laissez prendre. Mais ce type de réaction n’est palpable qu’au travers du prisme du scénario et de l’implication que l’on projette dans ce dernier. Aujourd’hui, de très nombreux joueurs prennent du plaisir sur Fortnite, Overwatch, ou bien même Call of Duty, ce qui prouve qu’il y a un très grand public en phase avec les jeux rapides, et à l’action intense, qui n’apprécieront probablement pas la proposition d’Hideo Kojima. Pour beaucoup le jeu est et sera lent, avec des phases de fusillades qui ne convaincront pas grand monde, et par cela, il est compréhensible que les gens n’aiment pas Death Stranding. Si l’histoire, et l’expérience ne vous attrapent pas pour vous emmener avec lui, alors c’est presque peine perdue.
Mais il faut savoir que ce soft n’est pas destiné à plaire à ce genre de joueurs (sans aucun aspect péjoratif pour cette communauté de joueurs). Kojima nous offre un simulateur d’exploration avec un excellent récit, et un jeu qui crée des sensations importantes chez le joueur, vous faisant tour à tour ressentir la solitude, la difficulté du monde créé et vous fait célébrer avec le protagoniste les phases de succès que vous atteindrez. L’histoire que nous vivons avec Sam Bridges ne peut pas être vécue dans un autre jeu, et c’est ce qui a prévalu pour une analyse positive de la part de la critique qui l’a encensé. Evidemment si vous pensez que ce genre de proposition n’a pas lieu d’être pour un jeu, et vous auriez raison (puisque nous avons tous et toutes des sensibilités différentes) ne vous forcez pas.
Pour comprendre un peu mieux le profil d’un joueur qui appréciera Death Stranding, l’on peut dire qu’il s’agit d’une personne qui aura apprécié les jeux de chez Quantic Dream, par exemple. Quelqu’un de passionné par ces jeux dans le style des Telltale Games, et pour qui l’expérience prime. Beaucoup de joueurs ont d’ailleurs trouvé ennuyants les jeux développés par les studios cités, tout comme certains joueurs ont pu trouver long un certain Red Dead Redemption 2.
Eh bien c’est au sein de toute ces références que peut se retrouver Death Stranding, et il est peut-être plus habile et approprié de juger un jeu sur ce qu’il est, en dépit parfois de nos attentes mal placées suite à un marketing un peu branlant. Avec par exemple cette review de l’Américain Game Informer et celle ensuite de GamesRadar+ :
« Le vrai problème est que le gameplay de Death Stranding est aussi simple qu’il n’y paraît, et les éléments qui l’entourent – l’histoire, le combat, et les objectifs de mission peu reluisants – ne sont pas assez satisfaisants pour ancrer le titre et faire s’investir les joueurs. Le mystérieux jeu de Kojima pourrait être épique par moments mais ne semble pas répondre au poids de l’attente. »
Ensuite, au delà de l’argument de différence, vient celui de l’incompréhension, qui incombe cette fois-ci à l’oeuvre. À l’instar d’un Christopher Nolan, Hideo Kojima produit des œuvres dont certains pans restent mystérieux de tous, et ce qui est compréhensible pour un film ne l’est pas encore pour un jeu vidéo, contemplatif qui plus est, comme l’atteste cette critique de The Verge :
« Ce n’est pas un jeu facile à apprécier. Il y a peu de concessions pour les joueurs non intéressés. C’est très lent, surtout dans les premiers chapitres, qui consistent en grande partie à livrer des colis sur des distances vertigineuses. Les premières conversations sont remplies de phrases et de mots qui seront incompréhensibles pour les non-initiés – et, honnêtement, la plupart d’entre eux restent un mystère après le générique. »
La chance du jeu vidéo réside dans sa diversité sans hiérarchie. Aucune option n’est mieux qu’une autre. Un joueur de FIFA ne vaut pas moins qu’un fan de Baten Kaitos, un amoureux de FPS n’est pas non plus moins exigeant qu’un fan de jeu à scénario. C’est pourquoi nous terminerons ce texte en défendant le fait que Death Stranding, et même le jeu vidéo en général, peut être à la fois un chef-d’oeuvre et une bouse puante, en fonction de nos attentes et du prisme que l’on appose sur lui. C’est aussi tout le sel de notre travail, à nous rédacteurs, qui lors de nos tests, tentons toujours d’être le plus ouverts possible à la proposition donnée par un jeu, sans pour autant se taire dans nos impressions portées par nos ressentis et nos émotions.