Neil Blomkamp fait définitivement partie des jeunes réalisateurs prometteurs. Après l’excellente surprise District 9, le satisfaisant Elysium, notre réalisateur originaire d’Afrique du Sud nous livre son troisième long-métrage intitulé Chappie. J’avais beaucoup d’inquiétudes pour ce nouveau titre suite à la légère déception d’Elysium, le pari était donc de mise. Il faut savoir que Chappie est en réalité une adaptation du court métrage Tetra Vaal toujours réalisé par Neil Blomkamp en 2004. Le scénario de Chappie est écrit par son réalisateur et sa femme, Terri Tatchell, deux amoureux de la science-fiction.
Allons droit au but, je suis ressorti du cinéma avec un grand sourire et soulagé. Je peux pleinement songer à Alien 5 avec une certaine sérénité (de toute façon, il ne peut pas faire pire qu’Alien Resurrection…). Il est grand temps de vous expliquer pourquoi et de vous présenter Chappie.
Critique Ciné Chappie
Je suis Chappie
Nous sommes en 2016 et la criminalité explose en Afrique du Sud. Les autorités recensent plus de 300 agressions par jour et sont dépassées par les événements. On retrouve notre Johannesburg poussiéreuse et où l’insécurité règne. Le gouvernement va donc faire appel à une société de production de robots. Tetravaal est une entreprise qui produit à la chaîne des robots nommés « Scout« . Ces machines humanoïdes (dont Neil Blomkamp a déclaré s’être inspiré du manga Appleseed de Masamune Shirow) ont pour but d’assister les forces policières et de lutter contre cette criminalité galopante. Deon (joué par Dev Patel) est le créateur de ce modèle et travaille secrètement sur un programme pouvant donner naissance à une conscience. Il va donc l’implanter dans un de ses robots, Chappie est né. Tel un enfant, Chappie doit tout apprendre de la vie et doit être éduqué même s’il est doté d’une incroyable intelligence. Il va malencontreusement atterrir dans une famille de gangsters (joués par le duo de choc Die Antwood). Ces derniers vont alors voir en Chappie l’opportunité de mener un braquage de taille, le premier robot gangster ! Pendant ce temps, l’ingénieur Vincent (joué par Hugh Jackman), ancien militaire, va tenter de mettre en pratique sa création « l’original » (dont son design ressemble à un Metal Gear !) jugée trop violente pour être commercialisée. Voilà pour le synopsis, rien d’étonnant vous allez me dire mais Chappie se démarque par sa portée philosophique et par son message véhiculé. Neil Blomkamp a expliqué lors d’une interview que Chappie était l’histoire d’une naissance d’une conscience innocente dans un monde violent. Ici, tout est question de l’âme.
Un robot plus humain qu’un humain
Le plus intéressant dans Chappie, c’est qu’il est le plus humain des personnages. Tout au long du film, il va rencontrer la violence et la haine humaine sans réellement comprendre ses raisons. Tant de fois, il va se demander « Pourquoi ? Pourquoi les hommes se font tant de mal? » tel un enfant qui assiste à une scène qu’il ne comprend pas. Évidement, il ne trouvera aucune réponse valable à cette question. Candide, peureux et impuissant devant ces scènes, la réalité ne lui fera pas de cadeau. Neil Blomkamp met donc brillamment l’espèce humaine au centre des préoccupations en nous disant que nous sommes moins humains qu’un robot. Chappie va être confronté à la violence, à la culture (il adore peindre), à la mort et va même considérer le couple de gangsters comme ses parents, parallèle tracé avec l’évolution d’un véritable enfant. Le réalisateur américain pointe également du doigt l’embrigadement dès le jeune âge. En effet, la naïveté et le côté docile d’une conscience innocente permettent de faire passer les crimes pour des bonnes choses. La morale n’est pas innée, elle se construit par l’éducation. D’ailleurs, l’éducation et l’orientation de Chappie vont être divisées. D’un côté, nous avons les gangsters qui veulent se servir de lui pour faire le sale boulot, de l’autre, nous avons son créateur qui veut simplement le laisser grandir, s’épanouir. Nous avons donc affaire ici à un combat du bien et du mal que chaque enfant a une fois dans sa vie. L’existence est jaugée par un manichéisme perpétuel. La conscience est fondamentalement bonne, c’est les facteurs extérieurs qui la corrompent et forgent cette « haine ».
Chappie : une leçon à la sauce science-fiction
Avec Chappie, Neil Blomkamp signe un film doté d’un message fort centré sur la conscience et l’innocence. Le personnage de Chappie (dont la voix est réalisée par l’acteur Sharlot Copley, eh oui, encore lui) est profond et nous renvoie à notre propre enfance, à notre éducation. On s’attache très rapidement à ce bout de ferraille humain. Bravo Neil Blomkamp, tu poses les bases d’une réflexion contemporaine, certes minimisée par le côté SF du film, mais bien réelle.