Assassin’s Creed Bloodstone n’est en soi pas une première pour la licence éponyme puisqu’elle est coutumière de proposer moult produits dérivés construisant toujours un peu plus un véritable univers étendu. Ainsi, nombre de romans, bande dessinée, mangas, comics ou encore des films d’animation ont vu le jour pour apporter en profondeur et offrir aux fans de la licence des récits narrant les aventures d’autres assassins que ceux que l’on joue dans la série de jeux. On peut alors prendre l’exemple de l’Indien Henry Green, mentor des jumeaux Frye, et héros du roman Assassin’s Creed Underworld, ou encore de Owen protagoniste du livre Assassin’s Creed: Last Descendants. La plupart de ces oeuvres sortent aux éditions Les Deux Royaumes – hormis les plus anciennes – créées par Ubisoft et sont donc toutes chapeautées par la maison mère.
Néanmoins, certaines œuvres entrent en contradiction les unes avec les autres ce qui ne rend pas toujours clair ce qui est canon de ce qui ne l’est pas. Néanmoins, rassurez-vous, celles que nous allons traiter aujourd’hui, soit Assassin’s Creed Bloodstone, est considérée comme faisant partie de l’univers étendu de la franchise.
Tomo est un jeune garçon vivant sur l’île de Kyushu au Japon dans un camp d’Assassins dirigé par son père Hajime. Nous sommes alors en 2000, quelque temps après que la confrérie s’est vue trahie par l’un des siens, Alex Cross, qui donna aux Templiers toutes les informations dont il disposait sur la localisation des différentes places fortes de la confrérie à travers le monde. Celle du Dakota a d’ailleurs fait les frais de cette trahison et s’est vue totalement détruite par l’ennemi juré des Assassins. Alors qu’Hajime et Yuri, la mère de Tomo, discutent de ces événements, une attaque survient et le jeune garçon voit sa génitrice mourir devant ses yeux avant d’être exfiltrée par son père.
Nous sommes aujourd’hui en 2017, et Tomo est l’un des plus jeunes membres d’une cellule d’Assassins japonais. Bien que non combattant, il excelle dans les sciences et dans le hacking, ce qui lui permet d’ailleurs de dénicher un détournement massif de données provenant d’une clinique en Suisse. Porté par une envie de vengeance, il est sur les traces des meurtriers de sa mère, Alex Cross donc, mais aussi une famille répondant au nom de Adler.
Son enquête et infiltration de la clinique vont le mener bien plus loin qu’il ne le pensait alors qu’il tombe sur une cellule d’Assassins menant des expériences via l’animal en vu de récupérer des informations concernant un vieux projet initié par la confrérie lors de la guerre du Vietnam. Il y est bien évidemment question des Précurseurs…
Scénarisé par Guillaume Dorison, qui était déjà a crédité à l’écriture de la bande dessinée Assassin’s Creed Conspirations, Bloodstone confirme que l’auteur a une parfaite maîtrise de l’univers d’Assassin’s Creed. Mature et sans concession, le récit flirt avec le roman d’espionnage dans sa partie mettant en scène Tomo, et avec le thriller conspirationniste lorsque l’on visite les souvenirs de l’Assassin Alkseï Gravani durant la période de la guerre du Vietnam.
Le récit se veut bien plus alambiqué qu’il n’y parait avec nombres de rebondissements bien sentis et grâce a une intrigue tournant finalement bien plus autour des Assassins que de l’éternelle guerre entre ces derniers et les Templiers. Dorison nous montre que tout n’est pas noir ou blanc et que même au sein de la confrérie il y a des dissensions et certaines cellules préfèrent même faire cavalier seul et cacher aux autres encapuchonnés leurs agissements.
Il y est aussi question d’un extrémisme trop peu de fois soulevé dans la série de jeu vidéo, même si la vengeance a déjà été une des thématiques fortes de certains épisodes. Mais elle n’est finalement ici qu’un prétexte pour aborder des questions plus épineuses liées à la manipulation génétique ou encore à savoir si la fin justifie les moyens. Le clifhanger de fin est d’ailleurs franchement très encourageant pour la suite des aventures de Tomo.
Concernant le dessin, on retrouve le dessinateur de la série de bandes dessinées Carthago, à savoir Ennio Bufi. Au coup de crayon très réaliste, son style colle parfaitement avec l’univers Assassin’s Creed et encore plus avec celui de Bloodstone. Il retranscrit à merveille les situations d’urgences et sait dynamiser son dessin lors de moments plus violents, sans jamais tomber dans un quelconque excès et dans un étalage de sang.
Le travail effectué au niveau des story-boards par Thibaud de Rochebrune est d’ailleurs admirablement bien accompagné par les dessins de Bufi. L’agencement des cases, leur remplissage et aussi les couleurs choisies par Andrea Meloni servent admirablement bien le récit en apportant différentes tonalités toujours en phase avec l’action.
Finalement, on ne retiendra que deux ou légers soucis. Le premier est l’accessibilité de cette bande dessinée aux non-initiés à la licence de jeux vidéo. En effet, il faut en connaitres les codes et l’histoire, au moins un minimum, pour pouvoir apprécier et comprendre les enjeux de l’histoire. Aussi, le deuxième point parfois gênant vient du fait que l’auteur emprunte parfois certains raccourcis assez faciles pour zapper des choses qui auraient pu poser problème, choses que l’on ne peut pas mettre en lumière ici par risque de spoiler, mais on pourrait par exemple parler de l’Animus. De même que si la période historique choisie lors des retours dans le passé est des plus enthousiasmantes, on aurait aimé de plus fréquents retours en arrière.
Assassin’s Creed Bloodstone est dans la droite lignée de beaucoup d’œuvres liées à l’univers étendu de la licence phare d’Ubisoft, à avoir bon, voire très bon par moment. Le récit est agréable à suivre et offre son lot de rebondissements bien amenés, le dessin est franchement agréable et en totale adéquation avec le ton adopté par la bande dessinée, alors que le travail sur les couleurs est remarquable. Seuls deux ou trois petites choses fâchent, mais cela n’entache en rien la qualité de l’ensemble et on a qu’une hâte, découvrir la suite et conclusion de ce Assassin’s Creed Bloodstone.