Le 15 septembre dernier, un acte avait particulièrement surpris : Bill Willingham, l’auteur du comics Fables, a fait passer son œuvre dans le domaine public. Autrement dit, l’intégralité de sa production est rendue accessible à l’ensemble du public susceptible de vouloir en faire ce qu’il en veut, et ainsi créer divers produits dérivés (films, séries, romans…) . Une décision qui, par voie de conséquence, touche au jeu vidéo développé par Telltale Games, The Wolf Among Us. Car oui, ce dernier tire sa source des histoires de Willingham.
Alors, pourquoi une telle initiative ? Willingham tente de l’expliquer au sein même d’une déclaration (publiée sur son blog), qui ne se démarque pas par sa tendresse. Loin de là. En fait, plus qu’un simple désir d’apporter des éléments au pourquoi de la chose, on assiste là à une véritable charge contre DC Comics, l’éditeur. L’auteur, ayant le sentiment d’avoir été lésé par ce dernier, estime en effet que la société qui « a bien changé en une vingtaine d’années » n’est plus à même de « diriger » sa propriété, et ce, en raison d’un manque total de respect envers ses créations et de ses droits. Voici les termes utilisés par Willingham lui-même :
Tout au long de mes relations d’affaires avec DC, avec Fables et avec d’autres propriétés intellectuelles, DC a toujours violé les accords qu’il avait conclus avec moi.
Et dans ces reproches, The Wolf Among US aurait également une place non négligeable. Si l’on se fie aux propos de Willingham, le jeu ne serait certainement pas fidèle au scénario qu’il avait conçu. « Personnages, décors et histoires », DC Comics aurait apparemment donné son feu vert pour que Telltales les modifie à l’insu de son créateur. Sans oublier que, dans tout cela, il y a avait la question de l’argent, lequel était très difficilement perçu par Willingham.
Ayant le sentiment que sa propriété commençait à lui échapper, l’auteur a donc décidé de soustraire Fables des « mauvaises mains » qu’il dénonce et de le mettre en possession des « bonnes ». Quitte à ce qu’il perde définitivement les droits, autant prendre les devants et essayer de tenir en échec « l’ennemi » qu’il combat, non ? Cependant, DC Comics entend bien s’opposer à ce dessein. Et, comme nous le montre sa déclaration officielle survenue le 17 septembre, DC fait valoir sa propriété et les droits qui l’entourent, dont ceux liés à l’exploitation :
Les bandes dessinées et les romans graphiques Fables publiés par DC, ainsi que les scénarios, les personnages et les éléments qu’ils contiennent, sont la propriété de DC et sont protégés par les lois sur les droits d’auteur aux États-Unis et dans le monde entier, conformément à la législation applicable, et ne font pas partie du domaine public. DC se réserve tous les droits et prendra les mesures qu’il jugera nécessaires ou appropriées pour protéger ses droits de propriété intellectuelle.
Les mots sont clairs et la direction que prend cette histoire le semble tout autant. Avec un tel communiqué, DC affirme sa position et met la lumière sur de futures possibles batailles judiciaires qui l’opposeront à Willingham. Le but sera certainement de déterminer si oui ou non l’auteur a le droit d’affirmer ce qu’il dit et agir dans ce sens. En substance, ce sont les droits mêmes de la licence qui devront se décider.
Et si Willingham venait à remporter le combat juridique qui s’annonce, l’affaire ferait certainement jurisprudence. Une telle issue pourrait ainsi conduire d’autres auteurs à faire de même et remettre en cause les lois qui existent quant à la propriété d’une licence. Un dénouement souhaité par Willingham :
« Depuis une dizaine d’années, mes idées sur la manière de réformer les lois sur les marques et les droits d’auteur dans ce pays (et dans d’autres, je suppose) ont subi une transformation radicale. Les lois actuelles sont un méli-mélo d’accords en coulisses contraires à l’éthique, visant à maintenir les marques et les droits d’auteur entre les mains des grandes entreprises, qui peuvent largement se permettre d’acheter les résultats qu’elles souhaitent. […] Dans mon modèle de réforme radicale de ces lois, j’aimerais que toute propriété intellectuelle soit détenue par son créateur originel pendant une période maximale de vingt ans à compter de la première publication, après quoi elle tomberait dans le domaine public et pourrait être utilisée par tous. »
En attendant d’en savoir plus, on le rappelle, Telltale est actuellement en train de plancher sur le prochain opus de The Wolf Among Us, lequel a pris un peu de retard sur sa programmation initiale. Dorénavant, c’est en 2024 qu’il devrait voir le jour. Mais d’ici là, on verra probablement quelques sorties publiques le concernant.
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