Après une sortie reportée de quelques mois, Tales of the Shire : Un jeu Seigneur des Anneaux est enfin disponible. Le titre est le premier « cosy game » se déroulant dans l’univers du grand J.R.R. Tolkien, et nous promet de couler des jours paisibles dans la Comté avec notre petit hobbit. Une vie douillette, rythmée par les saisons, les amitiés, et l’apparition d’un mystérieux magicien à la barbe grise et au chapeau pointu. Tales of the Shire réussit-il à nous faire voyager en Terre du Milieu, ou n’est-il qu’un énième simulateur de vie à la ferme sans aucune originalité ?
(Test de Tales of the Shire réalisé sur PC à partir d’une copie commerciale)
Mon royaume pour un hobbit
Si on vous demande de penser aux hobbits de Tolkien, les premières images qui vous viendront en tête seront sûrement Frodon, Sam et Bilbon, leurs pieds poilus et leur amour pour la nourriture. Dans le Hobbit et le Seigneur des Anneaux, ils sont un peuple paisible, un peu renfermés sur eux-mêmes, loin des soucis du monde extérieur. La Comté, décrite comme une version idyllique d’une campagne anglaise fantasmée et adorée par son auteur, semblait donc être le décor tout trouvé pour créer un cosy game. Quand on est à la fois fan du genre et du Seigneur des Anneaux, l’idée sonne alors comme une évidence !
Tales of the Shire commence par la création de notre personnage, qu’on pourra modifier à tout moment. Gandalf approche pour nous conduire sur sa charrette à Lézeau et y rencontrer nos nouveaux voisins. Les graphismes simples et le design doux, voire androgyne, des hobbits ne plairont pas à tous, mais ne semblent pas à côté de la plaque pour ce genre de jeu dans le contexte de la Comté.
Comme dans quasiment tous les titres du genre, nous récupérons une maison en bazar avec un jardin en friche : à nous d’y mettre de l’ordre, de décorer notre intérieur et de planter de nouveaux légumes. Le système de décoration et de personnalisation de la maison est particulièrement réussi, avec beaucoup de liberté et d’options. De quoi créer le trou de hobbit le plus douillet possible.
Le jeu suit une histoire principale : Lézeau n’est pas officiellement reconnu comme un village selon les règles de la Comté. Avec l’aide des habitants, notre hobbit va se plier en quatre pour impressionner l’inspecteur et enfin décerner le titre à la petite localité. Pour cela, il faudra concevoir une spécialité culinaire, créer des clubs (et convaincre ses voisins de les rejoindre), ou organiser des fêtes. Rien de très palpitant, mais tout cela est tout à fait cohérent avec ce qu’on attend d’un jeu centré sur les hobbits : des problèmes triviaux, où le plus gros dilemme réside dans le fait de savoir ce qu’on va bien pouvoir servir à manger pour le dîner.
Qu’en est-il du second petit-déjeuner ?
L’une des originalités de Tales of the Shire, et l’élément central du gameplay, c’est évidemment l’importance accordée à la nourriture par nos amis aux pieds velus. Toute la vie des hobbits ne tourne finalement qu’autour des repas. L’objectif pour le joueur sera ici de préparer des recettes, d’en découvrir de nouvelles, d’améliorer ses plats, et surtout, d’inviter d’autres hobbits à venir les déguster.
Pour chaque recette, il faudra réunir des ingrédients spécifiques, qu’il faut souvent cultiver, ramasser ou pêcher nous-mêmes selon la saison. Chaque ingrédient a une saveur (sucré, salé, épicé, aigre ou amer), et chaque hobbit qui viendra manger vos préparations a des préférences gustatives. À vous de passer derrière les fourneaux pour satisfaire ces convives exigeants et améliorer vos relations avec eux. Plus vous serez ami avec les habitants de Lézeau, plus vous débloquerez de nouvelles recettes, décorations, ou d’endroits à explorer dans le village.
Si ce système est ingénieux, on peut regretter que les autres hobbits ne s’adressent que rarement à nous hors de ces repas ou des quêtes prévues par le jeu. Si vous essayez d’aller passer le bonjour à la tenancière de l’auberge ou au facteur, alors que l’histoire ne vous y invite pas, vous serez accueilli par un simple « au revoir »… Pour un jeu centré sur l’idée de communauté et de relations avec autrui, c’est dommage !
Une vie de hobbit trop monotone ?
Malgré ce gros point noir, les activités ne manquent pas. Entre l’histoire principale, les missions à effectuer pour les clubs, la pêche, la cueillette, la cuisine, la décoration, les vêtements… On démarre chaque journée en décidant sur quoi on voudrait se concentrer aujourd’hui, pendant que les jours avancent et que les saisons changent. Toutefois, ce serait mentir que de dire que Tales of the Shire n’est pas répétitif : certes, il y a des choses à faire tous les jours, mais on trouvera beaucoup plus de variétés dans les activités d’un Stardew Valley ou un Fields of Mistria.
Si Tales of the Shire reprend les codes du cosy game type simulation de vie à la ferme, en y ajoutant la touche Seigneur des Anneaux (sur cet aspect, les hobbits et la Comté sont réussis !), il en laisse certains de côté : pas de romance, pas de grands moments d’émotion avec les personnages quand vous débloquez un certain niveau de relation (ici, vous aurez droit à des améliorations de boutiques ou à de nouveaux points sur la map), pas de mine, pas de musée, pas de festival…
Autant d’éléments qui auraient tout à fait eu leur place dans cet univers, et dont l’absence laisse un petit arrière goût d’inachevé. Impossible aussi de fumer l’herbe à pipe ou de boire une pinte au Dragon Vert, pour des question de restrictions d’âge. On peut comprendre ce choix mais le regretter, tant ces activités sont indissociables du lore des hobbits chez Tolkien.
Notons pour finir qu’au court de ce test, sur un bon PC et avec tous les paramètres au maximum, nous n’avons rencontré aucun bug, si ce n’est quelques rares chutes de FPS. De nombreux retours font état d’un jeu très buggué, surtout sur Switch, ce qui est effectivement fort dommage quand on sait que la sortie du titre a été reportée de quatre mois pour corriger les problèmes de performances.
Tales of the Shire est plaisant et tient sa promesse initiale : être un cosy game dans lequel on incarne un hobbit et nous permettre de vivre une existence tranquille dans la Comté. Cet aspect de l’univers de Tolkien est globalement bien retranscrit, et les codes du genre sont assez présents pour faire passer un bon moment aux joueurs.
Cependant, si le jeu pourra plaire aux fans de simulations de vie qui ne connaissent le Seigneur des Anneaux que de loin, l’inverse n’est pas nécessairement vrai. Si vous vous attendez à vivre une aventure épique aux côté de Bilbon Sacquet dans la tanière du dragon Smaug ou à mener une charge contre les forces du Mal avec cinq-cents Rohirrims, et que les jeux à la Animal Crossing et consorts ne sont pas votre tasse de thé, vous risquez d’être très rebuté par l’absence d’action et le côté répétitif du gameplay. La zone de la Comté dans le Seigneur des Anneaux Online sera sans doute un meilleur compromis pour vous.
Finalement, Tales of the Shire ne sort pas vraiment du lot parmi tous les cosy games qui envahissent nos consoles, si ce n’est par son système de cuisine bien pensé. Le jeu reste après tout une belle illustration de cet extrait du Hobbit : « si un plus grand nombre d’entre nous préféraient la nourriture, la gaieté et les chansons aux entassements d’or, le monde serait plus rempli de joie. »