Initié aux débuts des années 2000 par American McGee et édité par Electronic Arts, American McGee’s Alice se réapproprie les chefs-d’œuvre de Lewis Carroll et en imagine la suite dans un jeu de plateformes-aventure aux accents cauchemardesques et dérangeants.
Alice Liddell se trouve dans l’Asile Rutledge où elle est enfermée depuis l’incendie de sa maison qui a décimé sa famille. Celle-ci y est suivie depuis plus de dix ans par un médecin sadique l’obligeant à revivre ses propres traumatismes. Le joueur est amené à évoluer au pays des merveilles, tyrannisé par la Reine de Cœur qui y fait régner l’enfer et le chaos. On comprend rapidement que notre environnement décrépi est le reflet de la santé mentale de la jeune fille.
Ce premier opus va ravir une base solide de fans, car le parti pris graphique et la direction artistique glauque et horrifique issus de l’imagination des designers va trouver son public et convaincre la critique.
Il faudra pourtant attendre plus de dix ans pour connaître la suite de ses aventures. Entre-temps American McGee a fondé Spicy Horse, son propre studio, mais reste édité par Electronic Art. Alice : Retour au pays de la folie fait un retour remarqué en 2011 sur toutes les plateformes de l’époque (PC, PS3, Xbox 360).
Bien que le jeu soit d’une certaine redondance avec peu d’armes à disposition, il garde pour lui sa sublime direction artistique, un ton toujours aussi horrifique et dérangeant et accentue son background. Ici, l’esprit d’Alice a presque atteint le point de rupture, un train infernal saccage ce qu’il reste du pays des merveilles. Elle va tenter de réunir les fragments de sa mémoire pour enfin comprendre les origines de son traumatisme.
Ce fut un nouveau (petit) succès, mais celui-ci laisse apparaître au grand jour les désaccords entre EA et McGee. En effet, il est reproché à Electronic Arts d’avoir communiqué sur un jeu « d’horreur hardcore », brouillant l’image d’un opus qui garde certes une esthétique forte, mais se recentre sur son personnage, sa folie et ses tourments. Cela aura des conséquences sur les ventes et le bouche-à-oreille n’y aidera pas suffisamment. Pourtant, les joueurs qui auront eu le plaisir de se confronter une nouvelles fois au pays des merveilles en gardent souvent un bon souvenir, témoignant de leur attachement à la franchise.
American McGee réagira plus tard en interview en déclarant ceci :
« Ce qui était frustrant, c’était de voir comment EA Marketing interférait, en disant à STS [société responsable des bandes-annonces NDLR] dès le début que la direction créative était régie par eux et pas par nous (les développeurs derrière le ton et l’histoire). Cela a donné naissance à des trailers beaucoup plus gores et sombres que le jeu… et c’était une rupture volontaire d’EA. Ils voulaient tromper les joueurs en leur faisant croire qu’Alice : Retour au Pays de la Folie était un titre d’horreur hardcore, même si nous refusions d’opter pour ce ton. Leur pensée était que même si ce n’était pas le cas, vous pouvez communiquer là-dessus et tromper les joueurs pour qu’ils l’achètent (tout en écartant les joueurs plus casual, comme les joueuses, qui peuvent prendre peur avec des trailers sombres). »
EA fera le choix de communiquer sur ce trailer d’introduction du jeu, sans montrer la moindre action du jeu ni aucun environnement qui sont pourtant les principaux atouts du titre. Un choix a postériori incompréhensible.
C’est à la surprise générale qu’en Septembre 2017, American McGee se déclare intéressé pour lancer le chantier d’un troisième opus. Il faudra néanmoins attendre mars 2018 pour que McGee interroge sa communauté sur Facebook qui s’emballe immédiatement de cette perspective. Dès lors, un financement participatif est lancé via la plateforme Patreon qui va rapidement rencontrer le succès, permettant aux neuf développeurs de démarrer la préproduction.
C’est vers un préquelle intitulé Alice Asylum que se dirige les nouvelles aventures d’Alice, âgée cette fois de 13 ans, qui va revenir aux codes esthétique vus dans le premier opus avec une jeune fille toujours aussi tourmentée. L’histoire débutera à son arrivée à l’asile Rutledge suite à l’incendie de sa maison. Seront évoquées des phases psychologiques d’acceptation du deuil telles que le déni, la colère et la négociation.
Au cours de son périple, Alice va devoir traverser les huit Royaumes du Pays des Merveilles et vaincre ceux qui les habitent pour parvenir à retrouver un semblant de paix intérieure. Son arsenal va être revu, car en plus de sa mythique Lame Vorpale, Alice pourra compter sur ses jouets de petite fille pour venir à bout de ses ennemis. Une large garde-robe magique sera également disponible. En plus de l’aide apportée traditionnellement par le chat du Cheshire, son petit lapin blanc aura un rôle à jouer. Alice Asylum promet ainsi de revisiter son propre mythe…
Or, un problème de poids subsiste quant à l’avenir de ce futur Alice Asylum. En effet, les droits sont toujours détenus par Electronic Arts qui n’est pas, à ce jour, partie prenante dans le processus de création. American McGee a, pour le moment, la main sur le développement, le financement et l’édition, et compte tenu des griefs contre EA, la situation semble bloquée.
Seuls motifs d’espoir, la production avance à grands pas et American McGee continue régulièrement d’informer via les réseaux sociaux, notamment Instagram, sur l’avancée du projet. La communauté reste très active et continue de suivre la progression de la production comme en témoignent les quelques 3000 contributeurs réguliers.
À ce jour, nous ne savons toujours pas si Alice Asylum sera commercialisé ni sur quelle plateforme.