On ne présente plus les éditions Pix’n Love, qui nous montrent depuis plusieurs années, par le biais d’ouvrages majestueux et solidement documentés, que l’univers du jeu vidéo est bien plus profond qu’il n’y parait au premier coup d’œil… et à la majorité des profanes qui le dénigrent sans le connaitre vraiment. Aujourd’hui, c’est à l’une des séries vidéo-ludiques les plus emblématiques, à savoir Pokémon, que nous allons nous intéresser, même si le livre, La Grande Aventure de Pikachu, date en réalité de 2004. Ce qui signifie que le phénomène en question aura eu par la suite bien d’autres déclinaisons diverses et variées.
La Grande Aventure de Pikachu
Pikachu : un colossal pokémon
Pix’n Love oblige, on se doute bien que le livre proposera une analyse autrement plus poussée que ne le laisse paraître son titre, La Grande Aventure de Pikachu, qui pourrait éventuellement passer pour le nom d’un épisode de la série animée ou d’une bande dessinée pour enfant centrée sur notre petite boule jaune. Un seul regard à la liste des auteurs ayant contribué à l’ouvrage suffit pour se dire qu’on embarque pour un voyage analytique pointu et profondément décortiqué du phénomène Pokémon. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, même si quelques mots ne sauraient résumer la portée globale du livre : une étude en plusieurs points distincts d’un phénomène culturel planétaire, de sa création à ses perspectives d’avenir, en passant par ses périodes fastes mais aussi par ses côtés sombres. Et c’est ainsi qu’on s’aperçoit que le sous-titre du livre, Grandeur et Décadence du Phénomène Pokémon, est (sans doute volontairement) bien plus évocateur de son propos que son titre principal. Dirigé par M. Tobin, directeur de publication universitaire, le livre accueille les thèses d’une multitude de professionnels en diverses matières (anthropologues, universitaires, experts en sciences de l’éducation, pédagogues…) qui nous amènent à envisager le sujet en fonction de son impact humain et sociétal, et nous plongent dans les méandres d’une entité dont les jeux et les dessins animés ne constituent que la partie visible au grand public d’un iceberg fort conséquent.
Au terme de sa lecture initiatique, le lecteur aura fait le tour d’une grande variété d’embranchements psychologiques, économiques et sociaux qu’il était loin de soupçonner en capturant son premier Pokémon sur GameBoy. Et c’est dans le but de résumer les différents thèmes abordés, tout en respectant une nécessaire absence d’exhaustivité, que nous allons à présent survoler ensemble le sommaire de cet ouvrage, qui ne laissera de marbre aucun gamer passionné de Pokémon et de sociologie. Les titres de chapitres sont présentés tels qu’ils apparaissent dans La Grande Aventure de Pikachu.
Contexte et problématique
Le début du chapitre est constitué d’une intro rédigée par le coordinateur de l’œuvre. Il revient sur la création de la série, ainsi que sur la stratégie marketing de Nintendo dans cette envolée réussie. Notamment, il évoque deux visions distinctes, mais néanmoins toutes deux très concevables, de l’esprit qui a animé la conception et le développement de Pokémon. D’une part, une alchimie efficace entre un certain nombre de talentueux développeurs, une volonté de laisser à l’enfant le loisir d’orienter la création d’un univers qui lui parle et le réjouit, et un zeste de chance. D’autre part, un Nintendo envisagé comme un géant puissant, calculateur, méthodique, et qui sait comment charmer son jeune public. La suite du chapitre traite de sujets tels que la pédagogie dans les médias destinés aux enfants, l’importance du « mignon » dans la culture japonaise récente, ou encore les notions de capitalisme et de consumérisme dans la thématique chère à la série : « attrapez-les tous ».
Pokémon : une diffusion planétaire
Le début du chapitre s’intéresse plus précisément au Japon et à sa culture telle que perçue à travers le monde, puis dérive vers l’américanisation de cette culture orientale, en évoquant bien entendu la série Pokémon telle qu’elle existe et évolue entre ces deux cultures. Les auteurs évoquent, pour faire suite logique à ces concepts, la localisation américaine de Pokémon, avec toutes les modifications que cela implique, tant en termes d’amour que de sexe ou de violence. Le chapitre se poursuit sur les différentes voix anti-Pokémon qui se sont élevées à travers le monde face à la déferlante ; on y apprend notamment que la série est souvent considérée comme monstrueuse et capable de prendre le contrôle spirituel des enfants, mais aussi qu’elle a essuyé bon nombre de frondes des anti-mondialisation, des anti-Japon, ainsi que de certaines instances religieuses.
Tandis que le précédent chapitre voyait large et abordait surtout les aspects mondiaux du sujet, le début de celui-ci se centre à nouveau sur l’enfant. Sur le petit garçon et sa vie au sein de l’univers Pokémon, un univers de poche dans lequel il devra interagir, enseigner, comprendre, jouer, bref, on évoque les aspects pédagogiques de la chose. La suite du chapitre prend pour exemple deux lieux, à savoir Israël et la France, pour analyser en profondeur les différentes visions et les différents aspects inhérents aux cultures types dans leur acception du phénomène Pokémon.
Pokémon à l’école
Plus intimiste encore, ce chapitre débute sur les écrits d’une ancienne institutrice, qui a décidé d’observer chez ses petits élèves de moins de sept ans comment ils se servent des Pokémon pour atteindre leurs propres objectifs et idéaux, par le biais d’un programme scolaire basé sur la licence. S’ensuit une autre étude très liée, celle consistant à laisser l’opportunité à l’enfant de rédiger sa propre histoire centrée sur le phénomène Pokémon, afin d’extraire de ces écrits une substantifique moelle, notamment en la comparant à celle d’autres élèves ayant planché sur le même thème. Puis, la suite du chapitre évoque les notions de virilité pré-ado et de maturité chez l’enfant en regard de ce phénomène Pokémon, par exemple lorsque confrontées à d’autres univers, tels que le catch ou autres centres d’intérêt montants chez l’enfant. On s’interrogera de ce fait sur la question de puérilité, liée à l’affection de certains enfants envers les monstres de poche tandis que leurs congénères arborent des passions bien plus envisagées comme « adultes ». Le chapitre se conclut sur une étude de la grandeur et de la décadence du phénomène, qui résume le livre entier, en partant du postulat que, quoi qu’on en pense, ce produit typiquement japonais a effectué l’une des percées les plus colossales dans le marché mondial du divertissement culturel.
On ne le répétera jamais assez, cet article est loin d’aborder ne serait-ce qu’une infime partie de la profondeur dont fait preuve le livre. Il ne fait qu’évoquer la globalité d’un trésor de culture, de références, de pensée et de connaissances, ce dans le but de vous donner envie de vous y plonger sans pour autant vous en révéler trop, afin de vous laisser le plaisir de la découverte. Entourées d’aspects sociétaux, psychologiques, économiques, pédagogiques, les coulisses de l’univers Pokémon s’avèrent autrement plus complexes que ne le laissent paraître ses apparences, et ce passionnant ouvrage n’aura de cesse de vous y plonger toujours plus avant.